Par Peggy Brekveld
Peu de gens à l’extérieur de la communauté agricole savent que l’on commence habituellement à planifier la prochaine saison de croissance bien avant la fin de la saison en cours. En effet, de nombreux agriculteurs pensent déjà aux activités de l’année qui vient, aux besoins en éléments nutritifs des cultures, par exemple, ou à la façon d’assurer la santé du sol. Les plans comprennent généralement l’utilisation d’engrais et la mise en œuvre de pratiques exemplaires de gestion à cet effet.
En fait, les engrais sont au cœur des préoccupations de nombreux agriculteurs ces jours-ci, mais pour deux raisons bien différentes. D’une part, les tarifs douaniers imposés par le gouvernement canadien plus tôt cette année sur les engrais importés de Russie en réponse à la guerre en Ukraine, et d’autre part, la cible fédérale de réduction de 30 % des émissions d’oxyde nitreux provenant de l’agriculture.
Le sujet a d’ailleurs occupé une grande partie des discussions lors de la récente réunion du Conseil consultatif sur les politiques de la Fédération de l’agriculture de l’Ontario (FAO), tenue à Orangeville, et nous souscrivons aux préoccupations de nos membres et de nos organisations agricoles partenaires.
Les tarifs douaniers et les émissions sont des questions tout à fait différentes, bien qu’elles concernent toutes les deux les engrais, et la FAO s’est penchée sur chacune cet été. De London à Sudbury, en passant par Niagara et Ottawa, la FAO a tenu des réunions avec Marie-Claude Bibeau, ministre fédérale de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire (AAC), Francis Drouin, député et secrétaire parlementaire de la ministre Bibeau, Kody Blois, député et président du Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Lisa Thompson, ministre ontarienne de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire, et divers fonctionnaires et membres du personnel ministériel.
À chacune de ces réunions, nous avons fait part des préoccupations des agriculteurs à l’égard des questions relatives aux engrais et avons engagé des discussions en vue de trouver des solutions éventuelles. Voici ce que nous savons jusqu’à présent.
Les tarifs douaniers imposés par le gouvernement fédéral sur les engrais importés de Russie ont imposé un fardeau financier supplémentaire aux agriculteurs, déjà aux prises avec les prix exorbitants des engrais, les effets de l’inflation et la hausse des taux d’intérêt. À l’approche de la saison de croissance 2023, l’incertitude plane toujours.
Les répercussions financières sur le secteur ne sont pas négligeables; beaucoup les ont déjà ressenties ce printemps. Alors que la crise en Ukraine se poursuit, et pour diverses autres raisons, il est peu probable que les tarifs douaniers sur les importations d’engrais soient abolis, et cela continuera vraisemblablement à influer sur les cours mondiaux de cet intrant essentiel. Bien qu’un remboursement direct des revenus déjà générés ne fasse pas l’objet de négociations, la FAO continue de faire valoir la nécessité d’un nouveau financement fédéral pour aider les agriculteurs à composer avec la hausse des coûts des intrants.
Parallèlement, la cible fédérale de réduction de 30 % des émissions d’oxyde nitreux par rapport aux niveaux de 2020 d’ici l’année 2030 a suscité de vives inquiétudes dans notre secteur. Contrairement à ce que beaucoup de gens pensent, cela ne se résume pas à réduire l’utilisation des engrais; ne confondons pas utilisation d’engrais et émissions d’oxyde nitreux. Parmi les sources d’émissions d’oxyde nitreux, mentionnons la mauvaise utilisation des engrais par les cultures après l’application en raison de divers facteurs, comme les conditions météorologiques, le type de produit, voire le moment ou la méthode d’épandage.
Comme la ministre Bibeau l’a clairement réitéré lors de réunions avec la FAO et d’autres membres du secteur : la cible de 30 % représente un but vers lequel tendre; il ne s’agit pas d’une réduction obligatoire de l’utilisation des engrais. Tous les efforts visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre provenant des engrais sont volontaires.
C’est également ce qui ressort du récent document de discussion d’AAC publié dans le cadre de son processus de consultation actuel sur la cible de réduction.
Plus précisément, le document reconnaît le rôle essentiel que joue l’engrais dans l’agriculture moderne et insiste sur l’amélioration de la gestion de l’azote et de l’utilisation des engrais par la mise en œuvre plus large et améliorée de pratiques exemplaires de gestion reconnues pour réduire les émissions dans les exploitations agricoles.
Il s’agit de pratiques que de nombreux agriculteurs ont déjà adoptées, comme appliquer la méthode des 4B (le bon produit, à la bonne dose, au bon moment et au bon endroit), réduire le travail du sol et recourir à des technologies d’application de précision. Le gouvernement s’intéresse notamment à la manière d’accroître l’adoption de ce type de pratiques dans le secteur, puisqu’elles présentent de nombreux autres avantages environnementaux et économiques, au-delà de la réduction des émissions.
Il sera d’autant plus important de déterminer la meilleure façon de mesurer les progrès en matière de réduction des émissions d’oxyde nitreux. Nous sommes fortement convaincus que l’approche la plus rigoureuse serait de mesurer le taux d’adoption de pratiques exemplaires de gestion plutôt que de suivre les achats d’engrais.
Pour atteindre cette cible, les agriculteurs devront également pouvoir compter sur le soutien du gouvernement et, étant donné le nombre d’exploitations qui ont déjà mis en œuvre certaines ou l’ensemble de ces pratiques, nous espérons voir une quelconque reconnaissance des adopteurs précoces et du travail qu’ils ont déjà accompli volontairement pour protéger l’environnement.
La FOA prépare actuellement une réponse à la consultation sur la réduction des émissions d’engrais, et j’invite tous les agriculteurs à consulter le document de discussion d’AAC et à formuler leurs propres commentaires. La date limite pour soumettre des commentaires au gouvernement est le 31 août.
Ce sont là des questions importantes qui touchent nos exploitations agricoles et nos entreprises, et il est impératif que nous ayons de sérieuses discussions les uns avec les autres ainsi qu’avec le gouvernement tout en continuant d’œuvrer à trouver des solutions.
Pour obtenir de plus amples renseignements, communiquez avec :
Tyler Brooks
Directeur des communications et des relations avec les intervenants
Fédération de l’agriculture de l’Ontario
519-821-8883, poste 218
tyler.brooks@ofa.on.ca